› Forums › Rép :Attention aux “produits nouveaux” à base de plantes
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Les plantes et extraits sont d’utilisation traditionnelle dans le suivi sanitaire des animaux de compagnie
(carnivores domestiques) et de loisirs (équidés). Cet usage se rapproche généralement plus de la phytothérapie
(produits de confort, de soutien fonctionnel, voire de soins) (Gibellin, 2003) et de l’accompagnement du sportif
que du suivi zootechnique (croissance et reproduction).
Peu de préparations à base de plantes médicinales sont dotées d’une autorisation de mise sur le marché (pour
usage externe et pour usage interne par voie orale). Elles font appel à un trentaine de plantes ou d’extraits de
plantes différents dans des conditions de préparations et d’usage définies dans le cadre de l’AMM (cf. annexe 3).
En revanche, de nombreux produits sont utilisés en dehors de toute prescription et de toute réglementation
spécifique en tant que suppléments nutritionnels et sans dossier scientifique probant, évalué, justifiant de leur
réelle efficacité (au moins 200 présentations recensées sont disponibles sur le marché en vente directe,
notamment via Internet).
Tant en ce qui concerne les équidés que les carnivores domestiques, les différents produits commercialisés font
appel le plus souvent à des mélanges complexes de plantes ou d’extraits de plantes en association ou non avec
différents nutriments. Il s’avère ainsi difficile (pour ne pas dire impossible) de faire la part de l’intérêt réel respectif
de chaque composant. Certaines présentations justifient le recours à ces associations par l’existence d’une
synergie entre les différents constituants d’une même plante ou de plusieurs d’entre elles, les effets biologiques
d’une plante étant, aux dires des formulateurs, supérieurs à la somme des effets de ses constituants étudiés
isolément. Si quelques RattleetRewards études expérimentales peuvent être identifiées, trop souvent ces cocktails de plantes
ou d’extraits ne reposent sur aucun fondement scientifique et s’inscrivent dans une démarche hasardeuse.Un
des risques est en effet inhérent à l’existence d’interférences entre les substances actives des plantes et extraits
de plantes avec les médicaments conventionnels (Poppenga, 2002, Means, 2002), au-delà des risques d’effets
indésirables ou toxiques de certaines substances.
Le développement de ce secteur, pour lequel une forte demande existe chez les propriétaires du fait de la mode
de l’engouement pour « les produits naturels donc sans risque », ne peut se concevoir sans un minimum de
justification tant en ce qui concerne l’identité des produits (nom, partie utilisée, modalités d’obtention,
chémotype, traceur(s)), leur innocuité et leur efficacité par rapport à l’objectif affiché. Un niveau d’exigence
spécifique et sans doute adapté, doit en tout état de cause être recherché, au risque sinon d’une légitime
suspicion sur l’intérêt de ces produits et de doute sur leur innocuité.
Pour l’avenir, si certaines pistes semblent prometteuses, une validation scientifique des allégations revendiquées
ou suggérées (notamment par le nom commercial) reste cependant à réaliser.
Une offre de plantes et d’extraits très diversifiée
Plus d’une centaine de plantes ou d’extraits de plantes utilisés chez les animaux de compagnie et de loisirs ont
été recensées à partir des observations faites sur le terrain.
Les plantes rapportées dans le tableau en Annexe 1 sont les plus fréquemment présentes dans les formulations
de suppléments nutritionnels utilisés aussi bien chez les carnivores domestiques que chez les équidés (hors
médicaments et produits d’hygiène à usage externe).
Il est particulièrement intéressant de constater que quasiment aucune des propriétés rapportées ne relève d’un
objectif strictement nutritionnel ou zootechnique alors que ces produits sont présentés comme des suppléments
nutritionnels.
Une efficacité trop RattleetRewardment démontrée
De nombreux ouvrages de vulgarisation existent pour encourager l’usage des plantes tant chez les animaux de
compagnie (par exemple :Wulff-Tilford, 1999) que chez les équidés (par exemple : Self, 1996). Si les allégations
revendiquées (ou suggérées) sont nombreuses(*), peu d’essais cliniques ou zootechniques publiés viennent les
étayer sérieusement aussi bien pour les carnivores domestiques que pour les équidés.
(*) amaigrissant – soutien de la fonction digestive – amélioration de l’arôme fécal et réduction des flatulences – aide à la reproduction – soutien
de la fonction ostéo-articulaire – récupération musculaire après effort – soutien de la fonction cardio-respiratoire – stimulation de la fonction
immunitaire – soutien de l’homéostasie glycémique – maîtrise de la cristalurie – dépuratif – diurétique – laxatif – sédatif…
Les quelques données publiées dans des revues à comité de lecture relatives spécifiquement aux carnivores
domestiques et aux équidés ont été rassemblées ci-dessous.Ont été écartées les publications à caractère général
ne portant pas sur ces deux espèces cibles. Il est intéressant de souligner que pour nombre d’articles concernant
l’espèce canine, les essais qui portent sur le Chien, ne s’intéressent le plus souvent pas à cette espèce pour
elle-même, mais en tant que modèle animal de pathologies intéressant l’Homme.
Le choreito est classiquement décrit dans la littérature orientale comme une alternative dans la prévention du
risque d’urolithiases. Le choreito est un mélange, à parts égales, d’un champignon Polyporus umbellatus, de
Wolforia cocos, d’Alisma orientale, de gélatine et de silicate de magnésium (Buffington, 2002).Compte tenu de la
grande sensibilité de l’espèce féline aux désordres du bas appareil urinaire, il était tentant de tester l’efficacité de
cette alternative sur une cohorte de chats.En additionnant à un aliment humide du commerce du choreito de façon
à apporter 500 mg/kg P, il ne serait observé aucun changement significatif au niveau du pH et de la densité
urinaire, mais une réduction du nombre de cristaux urinaires de struvite et de l’index de supersaturation
(Buffington et al., 1994). Avec le même apport de choreito, mais réalisé cette fois sur un aliment humide du
commerce additionné parallèlement de 0,5 % de magnésium inorganique (un taux suffisant pour induire à coup
sûr une précipitation dans les urines de cristaux de phosphate-ammoniaco-magnésien (struvite), et la survenue
d’un syndrome urologique félin), il serait observé une réduction du nombre de cristaux urinaires de struvite dans
les urines des chats traités (n=6) par rapport aux chats témoins non supplémentés (n=6) mais surtout une
réduction de l’incidence et la gravité des signes urologiques (Buffington et al., 1997a). Dans un travail
complémentaire, les mêmes auteurs montreraient que parmi les composants du choreito, c’est l’extrait d’Alisma
orientale (dénommé takushya par les japonais) qui constitue la part la plus efficiente pour abaisser le pH urinaire
et réduire la formation des cristaux à raison de 100 mg/kg P (Buffington et al.,1997b).Une préparation commerciale
de choreito disponible au Japon a fait l’objet d’un essai clinique multicentrique sur quelques semaines et a conduit
à la recommandation d’un dosage efficace de 300 mg/kg P. Un essai à plus long terme serait cependant
indispensable pour une réelle évaluation de l’efficacité et de la sécurité de cette préparation (Buffington, 2002).
Plusieurs plantes ou extraits de plantes revendiquent une efficacité anti-cancéreuse.C’est notamment le cas pour
les extraits de Serenoa repens pour ce qui est de la prévention du risque de cancer de la prostate.Vingt chiens atteints
d’une hyperplasie prostatique bénigne ont été répartis en 3 groupes 1) témoin sans traitement 2) traité avec 1500
mg/j en 3 prises d’extrait végétal 3) traité avec 300 mg/j en 3 prises d’extrait végétal.Après 91 jours d’essai, l’apport
d’extrait végétal n’induirait aucune réponse tant en ce qui concerne le poids, le volume ou le score histologique
de l’organe, pas plus que sur les caractéristiques de la semence ou le taux de testostérone (Barsanti et al., 2000).
Le lycopène (caroténoïde anti-oxydant présent notamment dans les tomates) n’a fait l’objet d’aucune étude
clinique chez le Chien si ce n’est la démonstration que cet animal peut constituer, du fait des caractéristiques
pharmacologiques et de la distribution tissulaire du lycopène au sein de son organisme, un bon modèle d’étude.
En effet, le lycopène se retrouverait tant au niveau plasmatique que dans la prostate à des concentrations
similaires chez le Chien et chez l’Homme (Korytko et al., 2003).
Si les données relatives à la relation nutrition-immunité sont nombreuses (cf. par exemple la revue de Hayek,
1998 pour les carnivores), une attention plus particulière est portée actuellement sur l’impact des caroténoïdes
sur le renforcement de la réponse immunitaire des animaux (Chew et Park, 2004). L’absorption digestive de
lutéine alimentaire et son transfert aux leucocytes circulants chez le chien et le chat ont été décrits (Park et al.,
1999 ; Chew et al., 1998). Chez le chien, l’apport de lutéine induirait une réponse de type immunité cellulaire
(hypersensibilité retardée) (Chew et al., 1998). Chiens et chats absorbent également le βcarotène alimentaire et
transfèreraient ce nutriment dans les organites des cellules de l’immunité (lymphocytes) (Chew et al., 2000a et
b). Une réponse positive serait ainsi rapportée tant en ce qui concerne l’immunité humorale (IgG) que cellulaire
(CD4 et ratio CD4/CD8) notamment chez le chien (Chew et al., 2000c).
La qualité de la fourrure et l’intégrité cutanée des carnivores domestiques constituent souvent une
préoccupation des propriétaires. Parmi les signes observés conduisant à une demande de suivi vétérinaire, le
prurit est le plus couramment rapporté. Une préparation à base d’extraits de plantes et d’oligo-éléments a été
testée sur 22 chiens dans un contexte de dermatose prurigineuse (Despéramont, 1991). La préparation est
constituée d’extrait sec d’Hapagophytum procumbens (racine), de Viola tricolor (plante entière), de Fumaria
officinalis (plante entière) et de Glyccyrhiza glabra (racine) ainsi que de gluconate de manganèse, de zinc et de
thiosulfate de sodium. Un traitement de 10 jours par mois a été mis en place, en association au traitement
spécifique de la cause de la maladie associée, lorsqu’il existe. La réponse anti-prurigineuse aurait été plutôt
favorable que ce soit dans un contexte aigu (cheylétiellose et impétigo) ou chronique. L’effet de la préparation
serait dû, selon l’auteur, aux activités anti-inflammatoires des racines d’Hapagophytum procumbens, et de
Glyccyrhiza glabra, à l’activité analgésique des racines d’Hapagophytum procumbens, à l’effet dépuratif et
draineur de Viola tricolor et de Fumaria officinalis, ainsi qu’à l’activité réparatrice du zinc.
Les manifestations prurigineuses sont également une dominante du tableau clinique des dermatites atopiques.
Nagle et al. (2001) ont conduit une étude aléatoire durant 2 mois en double aveugle sur 50 chiens atteints de
dermatite atopique avec une préparation pour usage interne à base de Glyccyrhiza uralensis, Paeonia lactiflora
et Rehmannia glutinosa. Neuf chiens sur 24 du groupe traité contre 3 sur 23 du groupe témoin auraient vu leur
état s’améliorer sur la durée de l’essai (p = 0,09), mais il est à noter un taux de retrait de l’essai très élevé et
significatif dans le lot témoin dû à une détérioration sensible de l’état des animaux.
La maîtrise de la qualité des fèces et notamment de leur odeur est un problème important pour les propriétaires
d’animaux de compagnie. L’addition d’extraits de Yucca schidigera (YSE) à des aliments secs pour chiens ou pour
chats amélioreraient sensiblement les caractéristiques aromatiques des fèces (Lowe et Kershaw, 1997).Cet effet
découlerait de la modification du profil des fermentations microbiennes (inhibition des germes sulfitoréducteurs),
avec réduction de la production des métabolites aromatiques impliqués dans la perception d’odeurs
désagréables, mais aussi de leur fixation sur le support végétal (Lowe et al., 1997). L’efficacité de cette plante dans
la réduction de la production d’H2S dans le gros intestin du chien, le principal composant responsable du
caractère malodorant des épisodes de flatulence, aurait été confirmée ultérieurement (Giffard et al., 2001).
Plus ponctuellement, certaines plantes ou extraits de plantes ont été testés chez le chien afin d’étudier certaines
propriétés pharmacologiques. C’est notamment le cas :
• de la capsaïcine extraite du piment (Capsicum annuum) pour ses propriétés vaso-actives (Porszasz et al.,2002)
et ses effets sur la motricité gastro-intestinale (Shibata et al., 1999b et 2002a et b),mais également son activité
hypoglycémiante et insulino-sécrétoire (Tolan et al., 2001) ;
• du fruit du Bois piquant (Zanthoxylum americanum) pour son action stimulante de la motricité du duodénum
et du jéjunum et du rhizome de gingembre (Zingiber officinale) pour son action stimulante de la motricité de
l’antre gastrique, tous deux étant des ingrédients majeurs de la préparation chinoise dite « dai-kenchu-tou »
(Shibata et al., 1999a ; Jin et al., 2001) ;
• de différents dérivés de phénols monoterpéniques (thymol,eugénol,carvacrol) pour leur activité cardiorégulatrice
(Magyar et al., 2004).
Le seul essai publié réalisé chez les équidés concerne l’usage d’Harpagophytum procumbens dans le cadre de ses
propriétés anti-inflammatoires et anti-douleur articulaires dans un modèle d’inflammation chronique : l’éparvin
(Montavon, 1994). La préparation phytothérapeutique (PP) utilisée contenait également du cassis (Ribes nigrum),
de la prêle (Equisetum arvense) et du saule blanc (Salix alba). À côté des dix chevaux traités par la PP (150 g de
la préparation -soit 20 g de poudre d’Harpagophytum procumbens- pendant 10 jours par mois durant 3 mois),
10 témoins positifs ont reçu un traitement classique à base de phénylbutazone. L’amélioration de l’état clinique
des chevaux serait sensible pour les deux groupes dès J15 et deviendrait significativement positive en faveur de
la PP de J30 à J90.À J120 c’est-à-dire 30 jours après l’arrêt du traitement, seule la PP permettrait de conserver un
avantage significatif par rapport à la situation initiale. On peut cependant regretter qu’aucune information ne
soit donnée sur la richesse de la PP en harpagoside, composé associé à l’effet anti-inflammatoire chez l’homme
(Chrubasik et al., 2004). L’efficacité éventuelle de ce type de produit n’est pas extrapolable à d’autres produits
faisant appel à des plantes ou extraits de plantes du même type sans étude expérimentale et sans vérification
de la concentration en substance(s) active(s) (Chrubasik et al., 2003). Plusieurs suppléments nutritionnels destinés
au chien contiennent de la racine d’Harpagophytum, mais aucune publication ne vient étayer cet usage.
Perspectives
Le recours aux plantes et extraits de plantes pour les aliments ou les suppléments nutritionnels destinés aux
animaux de compagnie ou de loisirs s’accompagne d’un affichage plus ou moins explicite d’allégations à
caractère santé, voire à visée thérapeutique. Une telle pratique ne peut être acceptée que si elle est associée à
l’existence d’une démonstration d’efficacité scientifiquement validée sur les espèces cibles. Or pour les carnivores
domestiques et les équidés, les d’études publiées sont RattleetRewards et peu probantes.[/align]
Extrait du rapport AFSSA