Rép :Synthèse du rapport de l”Agence française de sécurité sanitaire des aliments

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#203900
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    [align=center]La zéaralènone[/align]

    La zéaralènone (ZEA) est une mycotoxine à effet oestrogénique se développant dans les céréales

    (maïs, shorgo, orge, blé, riz, avoine…), principalement au champ (flore du champ), lors du stockage

    du maïs en cribs9 ou dans l’orge dans la phase de germination au cours du maltage. Des souches

    isolées à partir de bananes peuvent également produire la zéaralènone

    La zéaralènone est produite par les champignons toxinogènes en même temps que d’autres toxines,

    notamment les trichothécènes, au cours de la maturation des grains de céréales lorsque les

    conditions climatiques sont mauvaises (exposition des épis aux intempéries) dans les régions

    tempérées d’Europe, d’Amérique et d’Asie (Gajecki, 2002).

    Toxicité aiguë

    La zéaralènone possède une faible toxicité aiguë après administration orale mais aussi intrapéritonéale

    chez la souris, le rat et le cobaye. La DL50 varie entre 4000 et plus de 20 000 mg/kg pc

    (JECFA, 2000).

    Toxicité sub-aiguë et sub-chronique

    Les études de toxicité orale sur 90 jours permettent de mettre en évidence que les effets observés

    aussi bien sur animaux de laboratoire que sur animaux domestiques dépendent des interactions de la

    zéaralènone et de ses métabolites avec les récepteurs aux oestrogènes. Les porcs et les moutons

    semblent plus sensibles que les rongeurs. Dans des études par administration réitérée, la NOAEL

    chez le porc est égale à 40 μg/kg pc/jour sur la base des effets oestrogéniques dans les tissus cibles

    et des performances en terme de reproduction. En revanche, la NOAEL chez le rat est de 100 μg/kg

    pc/j (JECFA, 2000 ; Kuiper-Goodman et al., 1987).

    Immunotoxicité

    Plusieurs altérations des paramètres immunologiques ont été montrées in vitro après exposition de

    lymphocytes à la zéaralènone : inhibition de la prolifération lymphocytaire après stimulation par un

    mitogène, augmentation de la production d’IL-2 et d’IL-5 (JECFA, 2000).

    Par contre, aucune étude réalisée in vivo ne montre d’immunotoxicité de la zéaralènone.

    Reproduction

    La zéaralènone induit des troubles de la reproduction chez les rongeurs et chez des animaux

    domestiques. Des effets oestrogéniques variés tels qu’une diminution de la fertilité, une augmentation

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    des résorptions embryolétales, une diminution de la taille des portées, des changements de poids des

    glandes surrénales, de la thyroïde et de l’hypophyse ainsi que des changements de niveaux sériques

    de progestérone et d’oestradiol ont été observés chez la souris, le rat, le cobaye et le lapin. Toutefois,

    aucun effet tératogène n’a été rapporté

    Toxicité sur les Animaux de compagnie et de loisirs

    Si les animaux de compagnie et de loisirs ne diffèrent pas fondamentalement des autres animaux

    domestiques quant aux circonstances et aux conséquences du risque lié aux mycotoxines, ils

    présentent cependant une différence notoire : celle de la durée de l’action toxique inhérente à leur

    longue espérance de vie. Pour ces espèces, c’est tout autant l’impact de consommation de faibles

    doses sur de très longues périodes avec des répercussions sur la fertilité ou les performances, la

    baisse d’immunité ou la sensibilité accrue aux agents infectieux, que le risque ponctuel lié à des

    contaminations massives associées à un tableau clinique plus explicite, qu’il s’avère particulièrement

    pertinent de connaître.

    • Les carnivores

    De fréquentes remontées du terrain laissent à penser que les carnivores domestiques (canidés et

    félidés) seraient susceptibles de présenter des signes cliniques de mycotoxicoses oestrogéniques

    suite à la consommation d’aliments secs contenant des céréales avariées (blé et surtout maïs).

    Cependant aucune de ces observations n’est clairement documentée et n’a fait l’objet de publication.

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    A l’occasion d’une enquête épidémiologique conduite entre mai 2001 et mai 2002 et portant sur la

    contamination des aliments destinés aux animaux domestiques, 45 échantillons d’aliments secs pour

    chiens disponibles en Pologne ont fait l’objet d’un dépistage de zéaralènone (Gajecki, 2002).

    Quarante-deux se sont révélés positifs avec des valeurs comprises entre 5 et 299,5 μg/kg. L’enquête

    conduite par Zwierzchowski et al. (2004) dans le même pays fournit des résultats comparables : sur

    57 aliments pour carnivores analysés, 48 (soit 86 %) se révèlent positifs à la zéaralènone (de 0,5 à

    299,5 μg/kg) avec un taux moyen de contamination de 36 μg/kg.

    Cependant, les seules observations faisant clairement le lien entre zéaralènone et reproduction des

    carnivores ont été faites dans des conditions de contamination expérimentale d’aliments à destination

    de chiens ou de visons. Aucune donnée n’est disponible dans l’espèce féline.

    Hidy et al. (1977) font les premiers référence à un nombre significativement réduit de corps jaunes

    chez des chiennes recevant durant 13 semaines une alimentation contaminée expérimentalement par

    la zéaralènone (1 mg/kg pv/j). Plus récemment, l’activité ciblée de la zéaralènone sur la fonction de

    reproduction de la chienne a été confirmée (Gajecka et al., 2004a et b). Des chiennes âgées de 6

    mois ont reçu de la zéaralènone pure additionnée à leur aliment, à la dose de 200 μg/kg pv durant 7

    jours, équivalant à une concentration dans l’aliment de 10 mg/kg environ. Au terme de cet essai, les

    animaux ont été ovario-hystérectomisés. Les tissus prélevés ont fait l’objet d’un examen

    macroscopique et microscopique. L’utérus était oedématié, hyperémique et hyperplasique avec un

    endomètre pulpeux et congestif. Le cervix et le vagin présentaient de nombreuses cellules

    métaplasiques. Quant aux ovaires, il était possible de noter une hyperémie, mais également une

    atrésie folliculaire. Avec un niveau de contamination inférieur (25 et 50 μg/kg pc durant 50 jours), il est

    noté un effet dépresseur sur certains paramètres de l’immunité humorale (Gajecka et al., 2004a).

    In vitro, des cellules de la granulosa et de la thèque interne exposées à 25 ng/mL de zéaralènone

    révèlent une dégénérescence vacuolaire, signant une atteinte fonctionnelle des tissus folliculaires

    (Skorska-Wyszynska et al., 2004). Au vu de ces observations, il n’est donc plus possible d’écarter

    l’éventuelle responsabilité d’une contamination, même faible, des aliments pour carnivores dans la

    survenue de troubles de la fécondité en élevage chez les femelles potentiellement reproductrices

    (oestrus prolongé, kystes ovariens, pyomètre, etc.).

    Parmi les animaux à fourrure, les visons (Mustela vison) constituent une catégorie à part compte tenu

    du caractère intensif de la conduite de la reproduction. L’impact d’un effet délétère éventuel de la

    zéaralènone a été évalué par Yamini et al. (1997) : un quart seulement des femelles mises à la

    reproduction et recevant des aliments contaminés à 20 mg/kg de zéaralènone ont mis bas. Les

    femelles vides ont toutes présenté une atteinte utérine (hyperplasie de l’endomètre, endométrite et/ou

    pyomètre) et ovarienne (atrésie folliculaire).

    Conclusions et recommandations

    L’effet toxique le plus préoccupant de la zéaralènone est son caractère de perturbateur endocrinien à

    activité oestrogénique. L’effet sur l’homme n’est pas avéré. En revanche, les porcins sont sensibles à

    la zéaralènone, et plus particulièrement les jeunes femelles. Chez cette espèce, la zéaralènone est

    métabolisée en α-zéaralènol, dont l’activité oestrogénique est supérieure à celle du composé parental.

    Cette bioconversion pourrait intervenir dans le tube digestif des ruminants. Le risque d’une

    contamination du lait des ruminants n’est pas avéré sur la base du taux de transfert non significatif.

    Néanmoins cette observation a été effectuée lors de quelques expérimentations chez des vaches

    laitières. La présence de zéaralènone et de ses métabolites, notamment l’α-zéaralènol, dans les

    produits animaux, devrait ainsi faire l’objet d’études complémentaires afin d’évaluer la réalité du

    transfert dans les denrées d’origine animale.

    La Dose Journalière Tolérable Provisoire fixée par le SCF en 2000 a été retenue pour la

    caractérisation du risque pour le consommateur. L’exposition alimentaire humaine est inférieure à la

    dose journalière tolérable sauf pour 2,5% des enfants de 3 à 14 ans, et pour 31% de la population

    végétalienne.

    Les principaux aliments vecteurs sont ainsi les céréales (maïs) contaminées au champ par des

    Fusarium producteurs. Les plans de surveillance devraient être confortés par la prise en compte des

    produits céréaliers à base de blé destinés à l’alimentation humaine et animale.

    Les animaux d’élevage peuvent être exposés à la zéaralènone contaminant les céréales et coproduits

    céréaliers à des teneurs élevées capables d’induire un risque d’apparition d’effets oestrogéniques,

    notamment chez le porc. Concernant les poussières de céréales (déchets de céréales), le problème

    est récurrent quant à leur niveau de contamination. Il serait recommandé de ne pas les utiliser pour

    l’alimentation animale.

    Il serait également souhaitable de disposer de plus de données de contamination de certaines

    matières premières, et notamment de fourrages et d’ensilages.

    Compte tenu de la part prépondérante prise par les aliments secs dans l’alimentation des carnivores

    domestiques, et de la contribution notable de certaines céréales à risque (maïs notamment) dans la

    formulation de ces aliments, des essais devraient être entrepris afin d’évaluer scientifiquement le

    niveau de réceptivité et de sensibilité des femelles reproductrices de ces espèces.

    Il serait souhaitable que des études toxicologiques soient réalisées selon les lignes directrices

    reconnues internationalement afin de réviser les doses journalières tolérables provisoires fixées en

    1999 et 2000 sur le fondement d’études insuffisantes.

    Enfin, des études devraient également être conduites pour améliorer les connaissances

    toxicologiques sur les interactions entre la présence de zéaralènone avec celle des autres

    perturbateurs endocriniens, ou des associations de toxines fusariennes, notamment de la zéaralènone avec des trichothécènes et des fumonisines.